CHEMINE CHEMINE
En Cévennes, la fée du mont Mars tape du pied et tonne la sentence sous la pluie ou le soleil ardent
« Chemine, chemine ».
L'enfant saute et gambade sur des chemins disparus, l'adulte rêve de sa maison et part pour les plus belles des promenades. Le jardin prend sa part d'émerveillement.
Les mots se métamorphosent en calligrammes. Sortilège ?
Les Cévennes retrouvées
Comptine de mes Cévennes
Cévennes mon éden
La Pelletine j’imagine
Toute l’année le Mazelet
Le romarin toujours demain
La bruyère jamais l’hiver
Mais en avril
Vaille que vaille
Je prends la draille !
Je taloche
le plafond les murs
les embrasures
À la pointe de la truelle
effacer les langueurs moisies
des hivers austères et gris
et surprendre l’étincelle
de chaque rayon de midi
Blanc d’Espagne ou d’ailleurs
Ouvrir les volets
S'étirer avec le battant de bois
Repousser de toutes les patiences du matin
l'obscurité
Déchirer la nuit
contre le mur
le bois verni déjà chaud
offre le ciel serein
d'une journée à inventer
Mélodie en de la châtelaine
seule en son domaine
Solitude sereine
Mon amour vogue sur les océans civilisés
mais il me reviendra par les vagues bleutées
Solitude insolite
dans le hameau sous le soleil
Zézaiements stridulations
soulignent le silence
Solitude solennelle
La nature est souveraine
les oiseaux éternels
et l'humain roitelet dans le bel univers
Mon amour obligé aux soliloques
NG
Trahison ?
Je vais superposer un temps une autre attente
à mon attente inassouvie
un sud plus au sud
une ville à ma clairière
Je vais superposer un temps une ivresse
à ma soif
des fontaines à tritons
à la source jaillissant du schiste
Je vais masquer un instant mes rêves étoilés
de coupoles enluminées
Je reviendrai
De ma demeure huguenote
savourerai
mon voyage en terre baroque
Trahison ?
Printemps
Le jaune des forsythias éclate joyeux
devant les discrètes maisons grises
Bouquets mousseux des merisiers
bientôt oubliés dans un déploiement vert
Voiles de fumées
Au sommet des crêtes les pins en cortège
sur le ciel limpide guident le regard vers
la douceur lointaine des vagues bleutées
Au-delà, la mer
Une giboulée de pétales blanchit soudainement le chemin
NG
Mars 2014
Le voleur de châtaignes
Multiples les crêtes des montagnes ourdies de laine
Trames courbes caressées par un bleu originel
Immenses les forêts qui tapissent chaque crête
De fils roux et or entrelacés de haute lisse
Invisibles les sentiers qui glissent sous la forêt
D’Eden en méandres étroits et secrets
Centenaires les châtaigniers sur le sentier
Offrant généreusement leurs fruits lustrés
Sous l’arbre à pain
Il n’eut qu’à ramasser
dos courbé
mains gantées
mais un doigt céleste
menaça
il fut chassé du paradis
dos courbé
mains meurtries
condamné à errer
sur le tapis mordoré
des bogues hérissées
Le voleur de châtaignes
NG
Le palharon
Que tresses-tu vannier ?
Le berceau de nos peines
Avec deux poignées
Qui voudra les partager
Ô vannier de la vallée
D’osier de châtaignier
Rends nos fardeaux moins pesants
Au fil des années
Nous puissions encore mener
De terrasse en terrasse
Nos pas laborieux
J’ai laissé le palharon
À la maison
Et légère je suis montée
Sur le rocher
J’ai dominé la vallée
(du Galeizon)
Tressée de châtaigniers
Le palharon
NG
Octobre 2013